Bonus de notre contre-enquête : Didier Rykner, le cœur du problème
Durant un mois, M. Didier Rykner s’en est pris en même temps à Rocher Mistral, à l’honnêteté et à l’avenir du patrimoine. Durant un mois, La Tribune du bob’Art s’est efforcée de répondre à chacun des mensonges publiés sur le château de La Barben, de diffuser ses articles, afin que le lecteur ne se laisse pas berner. Nous pensions au départ ne trouver que quelques erreurs et mensonges : notre important travail de contre-enquête et de documentation nous oblige aujourd’hui à admettre que l’entreprise qu’a menée M. Rykner était encore plus calomnieuse que ce que nous pouvions imaginer.
La « dispersion » du mobilier
D’autant plus calomnieuse que ce rachat a non seulement permis au château d’être restauré et préservé des nombreuses fuites qui le menaçaient, mais aussi d’être sauvé d’une dispersion mobilière de grande ampleur : les pièces que nous apportons ici attestent d’ailleurs bien de la volonté manifeste de M. d’Alançon de garder et de conserver intégralement le mobilier lié au château au sein du monument.
Captures d'écrans de mails entre Vianney d'Alançon et son avocat à propos de la vente du château et de son mobilier (certains noms et adresses ont été cachés pour préserver l'anonymat ; juillet 2019).
Cette bonne volonté n’aura pourtant pas suffi à garder au château de La Barben l’intégralité du mobilier Forbin-La Barben et certains éléments constitutifs du monument en lui-même. Il en va ainsi de ce meuble à deux corps et à retrait, qu’une photographie datée de 2019 publiée dans le cinquième article de M. Rykner laisse deviner, vendu aux enchères à Monaco par les anciens propriétaires pour un prix affiché entre 30 000 et 40 000€. D’autres meubles Forbin provenant de La Barben ont été vendus sans que M. d’Alançon ne réussisse à les récupérer.
Photo de droite : photo partagée par Didier Rykner où l'on voit un meuble Forbin (entouré en rouge). Photo de gauche : capture d'écran du site d'enchères HVMC où ce même meuble est en vente entre 30 et 40 000€.
Un échange de mails, que nous nous sommes procurés, laisse également deviner qu’un certain nombre d’éléments d’architecture du château ont été vendus et donc dispersés en Provence : impossible pour nous d’établir la liste précise de ces éléments, mises à part des chaînes désormais perdues, donc.
Capture d'écran d'un mail reçu par Vianney d'Alançon faisant état d'une proposition émanant de Mme Pillivuyt quant à la revente d'éléments du château de La Barben (certains noms et adresses ont été cachés pour préserver l'anonymat ; octobre 2019).
Les documents que nous avons pu consulter semblent pourtant indiquer que le château devait être vendu à M. d’Alançon avec l’intégralité du mobilier Forbin ou lié directement au monument et que les anciens propriétaires ont tout fait pour conserver certains éléments, d’une « valeur inestimable » selon la principale intéressée par la vente de ces meubles et éléments…
Que M. Rykner ne se fatigue donc pas à écrire un article entier sur la question de la possible dispersion du mobilier du château comme il l’annonce dans son dernier article : Vianney d’Alançon a interrompu et empêché cette dispersion. Vous trouverez également la photo d’un mail écrit par les anciens propriétaires qui souhaitaient vendre aux enchères une partie de l’important fonds d’archives de la famille Forbin se trouvant depuis 500 ans au château de La Barben.
Capture d'écran d'un mail de Mme Pillivuyt faisant état d'une potentielle vente de certains éléments (certains noms et adresses ont été cachés pour préserver l'anonymat ; juillet 2019).
Que veut M. Rykner ?
Alors que poursuit donc ainsi M. Rykner ? La restauration du patrimoine ? Le château de La Barben a bel et bien été restauré. La valorisation du patrimoine ? Jamais le château de La Barben n’aura été aussi fréquenté et jamais sa richesse historique n’aura connu tel rayonnement. La conservation du patrimoine et du mobilier ? Le rachat du château de La Barben par Vianney d’Alançon aura évité la dispersion d’un mobilier et d’archives infiniment précieux et permettra, dans les mois à venir, la restauration des nombreuses pièces à décors du monument.
Définitivement, nous ne comprenons pas ce que poursuit M. Rykner.
Que conclure également, lorsque M. Rykner écrit, dans la même série d’articles, que Rocher Mistral est coupable d’avoir mené des restaurations et aménagements sans autorisation de la DRAC – autorisations en cours de régularisation, soit dit en passant – et, en même temps, que les autorisations que le projet a reçues sont, de toutes façons anormales ? Pourquoi donc réclamer des autorisations si M. Rykner juge, presque systématiquement, que celles qui sont données n’auraient pas dû l’être ? On en conclue que M. Rykner estime que la DRAC doit faire son travail mais que, lorsqu’elle le fait, elle le fait mal. Une bien belle jambe pour les propriétaires de monuments historiques qui sont sans doute heureux d’apprendre qu’ils feraient mieux de s’adresser à Didier Rykner plutôt qu’à la DRAC pour restaurer un monument.
Manifeste de La Tribune du bob’Art
Cette contre-enquête nous aura ainsi permis d’affirmer nos convictions quant à l’avenir du patrimoine. Il faut en rabattre avec le conservatisme stérile de M. Rykner.
Non, le patrimoine n’a pas à être condamné à l’immobilisme. Nous affirmons, avec Olivier de Lorgeril, président de la Demeure Historique, que « la mise en économie des monuments historiques privés les sauvera », tel qu’il l’écrivait à Didier Rykner pour son article conclusif.
Le témoignage de Philippe Toussaint, président des VMF (Vieilles Maisons Françaises) donnera aux lecteurs des informations intéressantes : « Il n’est pas surprenant que le projet de Vianney d’Alançon suscite par son ampleur et sa médiatisation des points de vue variés. Mais il ne faut pas confondre «le projet » avec l’état effectif du bâti et des jardins. Ayant visité le château de La Barben le 7 juin dernier pour en avoir le cœur net, j’ai pu constater que celui-ci avait souffert en de nombreux endroits (grand escalier, chapelle…) de dégradations liées à des fuites d’eau, contrairement à ce qu’affirment les anciens propriétaires. C’est notamment le cas de la pièce dont certains des décors peints par Granet sont fort abimés. La réfection de toutes les toitures et terrasses par le nouveau propriétaire est donc salutaire. » Olivier de Lorgeril a par ailleurs confirmé son soutien à Vianney d’Alançon selon ce dernier.
Durant des siècles, les monuments (châteaux, églises, forts, etc.) ont été des lieux autour desquels la vie des peuples se développaient. Durant des siècles, ce qu’on n’appelait alors pas encore le « patrimoine » évoluait au gré des besoins des communautés humaines, dans le respect et la continuité de ce qu’avaient entrepris les générations passées.
De forteresse médiévale, le château de La Barben a ainsi été transformé au cours des siècles en château de plaisance. La revente du château en 1963 par le marquis Antoine de Forbin, dernier représentant de la lignée des Forbin-La Barben, actera définitivement pour le château la fin de 500 ans en tant que lieu de résidence privée. Le patrimoine doit aujourd’hui trouver des destinations nouvelles si l’on veut lui assurer un avenir et lui garantir une place de choix dans la vie des communautés humaines : la valorisation des cultures locales et la transmission du patrimoine en sont. C’est aujourd’hui ce qu’entreprend Rocher Mistral et c’est ce qui, à l’avenir, permettra véritablement la sauvegarde et le rayonnement du patrimoine privé : afin que le patrimoine ne soit plus systématiquement racheté par de riches fortunes étrangères privatisant ces lieux et les rendant inaccessibles au grand public ; afin que les français ne deviennent pas les étrangers de leur propre histoire et de leur patrimoine.
Plus encore, nous affirmons sans détour qu’il est une menace bien plus grande pour notre patrimoine que l’immobilisme : l’idolâtrie. M. Didier Rykner est de ces idolâtres des vieilles pierres qui voient dans les millions de grains de poussière tombant des plafonds des églises autant de reliques à conserver, à exposer et à chérir. M. Rykner a un rapport tellement désordonné au patrimoine qu’il appelle de ses vœux le Ministère de la Culture à condamner à l’immuabilité le pauvre village de Féchain (Nord).
Capture d'écran du retweet de Didier Rykner via La Tribune de l'Art, appelant le Ministère de la Culture à classer l'église pour empêcher l'aménagement de l'école.
M. Rykner s’érige en défenseur du patrimoine et de la réglementation. M. Rykner se réclame de la Charte de Venise de 1964, Charte internationale sur la conservation et la restauration des monuments et sites : qu’il nous soit permis de lui rappeler l’article 5 de cette charte :
« La conservation des monuments est toujours favorisée par l’affectation de ceux-ci à une fonction utile à la société ; une telle affectation est donc souhaitable mais elle ne peut altérer l’ordonnance ou le décor des édifices. C’est dans ces limites qu’il faut concevoir et que l’on peut autoriser les aménagements exigés par l’évolution des usages et des coutumes ».
Tel est l’esprit exact dans lequel a été pensé Rocher Mistral, au château de La Barben : être utile à la société tout en respectant le monument et tout en s’inscrivant dans la continuité de cet héritage millénaire.
Bien loin de défendre le patrimoine, M. Rykner le dessert, M. Rykner le condamne. Ce que défend M. Rykner, c’est la fin de l’histoire et l’incapacité de l’homme du XXIe siècle à poursuivre l’œuvre dont il est l’héritier. Que l’homme du XXIe siècle n’égale pas le génie bâtisseurs de ses aïeux est un constat que nous pouvons partager : mais le remède à cette faillite ne se trouve sûrement pas dans l’interdiction aveugle de toutes entreprises de restauration et de valorisation du patrimoine. Le remède se trouve bien au contraire dans le soutien des projets apprivoisant l’héritage de l’histoire et le poursuivant, selon les moyens et les besoins qui sont ceux de notre temps, dans le respect de ce qui est et dans l’espérance que ce qui sera enrichira encore la richesse de notre civilisation.
Le conservatisme de M. Rykner est le fruit d'un déracinement profond qui préfère aux nécessités de la vie l’immobilité d’un bloc de grès ou qui interdit au patrimoine de trouver une affectation nouvelle et utile à la société. M. Rykner est très certainement un homme hors-sol dont l’amour du patrimoine tient plus du culte que de l’admiration. M. Rykner veut faire de ce pays un vaste musée, immuable, intouchable. M. Rykner veut voir ce pays dans le formol. Vianney d’Alançon déclare à ce sujet : « Nous voulons, au contraire, renouveler avec le génie et l’ambition qui animaient les bâtisseurs de cathédrales. Nous appelons de nos vœux la naissance de nouveaux bâtisseurs afin que, demain, les livres d’histoire ne s’arrêtent pas au XXe siècle, afin que notre siècle ne soit pas simplement celui de la conservation mais aussi celui de la transmission, de la continuation et de la projection dans l’avenir.
Bien sûr, cette ambition ne peut justifier destructions et dénaturations abusives : elle doit se faire en bonne intelligence et respecter ce que nous recevons des siècles passés. Mais s’il a été permis au château de La Barben, au Louvre et à tant de monuments d’évoluer au cours des années, qu’il soit aussi permis au XXIe siècle d’apporter sa pierre à l’édifice de l’histoire. Qu’il soit, en somme, permis à notre temps de poursuivre l’histoire, en ne perdant ni son héritage, ni la signification de cet héritage. » Car, si le combat pour le patrimoine se réduit à l’immobilisme et à l’idolâtrie, alors le combat est déjà perdu.
Maxime Bertin
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